Jeanne Mordoj

RÉSIDENCE D’ÉCRITURE

DU 8 au 26 JUIN

octobre 2019 / ITV réalisée par Emmanuelle Lemesle pour La Brèche

Ce printemps, vous venez en résidence de recherche à La Brèche, un lieu que vous connaissez bien. En profiterez-vous pour explorer de nouvelles pistes de travail ?

Jeanne Mordoj : Au départ j’avais un sujet précis en tête, autour duquel je tourne depuis longtemps, celui la transformation d’une femme en poule. Or je crois que je suis encore trop jeune pour aborder ce thème ; cela ne serait pas assez pathétique. Je vais finalement travailler sur des thèmes plus larges qui m’interpellent depuis toujours : la transformation, les phénomènes de foire, le monstrueux et plus particulièrement les êtres siamois. Je ne sais pas encore à quoi cette recherche aboutira, si ce sera un spectacle ou une autre forme; c’est encore très ouvert.
Durant ces résidences, j’alternerai recherche et travail au plateau; pour moi tout passe toujours par le corps. La recherche mêlera écriture, dessin, rêverie. Je me laisse conduire par ces outils, sans plan préétabli. Pour moi, c’est une chance de ne pas avoir fait d’écoles et d’avoir profité de libertés tout en suivant mes instincts, relevant plus du ventral que du cérébral. D’où ma pratique fréquente de la ventriloquie. C’est une chance aussi de pouvoir profiter de ces temps de résidence sans enjeu, où l’on n’est pas tendu vers une date de création de spectacle. Ces moments permettent de suivre des chemins plus sinueux,  d’être à l’écoute de ce qui peut advenir d’imprévu. Le spectacle forain m’inspire beaucoup. Je le vois comme une forme singulière de relation avec le public. Il implique une grande proximité avec les spectateurs, une forte dimension spectaculaire. Un état  d’esprit aussi, qui est proche des émotions, de l’instinct. Ce dont je veux parler, au fond, c’est de l’intime : ce qui se passe en nous et qui n’est pas toujours facile à décrire. Les résidences sont pour moi des moments d’exploration en solitaire mais aussi des temps de recherche avec des collaborateurs qui m’apportent beaucoup : la scénographe et costumière Yvett Rotscheid, la chorégraphe et danseuse Olivia Cubero, le musicien Mathieu Werchowski.