La Brèche

Familiar Faces est l’une des six compagnies lauréates de circusnext 2018-2019. Qu’est-ce que ce soutien signifie pour vous ?
Familiar Faces : Circusnext est un dispositif incroyable pour des artistes émergents comme nous. Cette plateforme apporte une visibilité au sein d’un réseau international, des opportunités de programmation, un soutien financier et, le plus important, des lieux de résidence partout en Europe. Il est essentiel pour un artiste d’avoir un espace de travail à disposition pour pourvoir mûrir son projet, et éventuellement « créer un bon spectacle ». L’existence d’un réseau de personnes engagées dans l’accompagnement de jeunes artistes, qui croit à leur projet de création, est une chance inouïe. Une initiative comme Circusnext, soutenue par l’Union Européenne, montre bien l’intérêt grandissant pour les arts du cirque, et est, de manière générale, nécessaire pour le développement de ce champ artistique. Nous sommes reconnaissants et aussi très excités de pouvoir enfin retravailler sur notre projet Surface, que nous avons un peu ajourné puisque nous sommes par ailleurs impliqués dans d’autres projets artistiques.

À propos, vous avez travaillé avec Alexander Vantournhout (également lauréat Circusnext, en 2013-2014), pour son spectacle Screws. Comment se sont faites la rencontre et la collaboration ?
FF : Nous avons fait la rencontre d’Alexander à l’ACaPA, où nous avons étudié. Alexander y donnait des cours. C’est à cette période que nous avons vu sa performance Aneckxander, créé avec le soutien de Circusnext. Peu de temps avant que nous ne soyons nous-mêmes présélectionnés pour Circusnext, Alexander nous a sollicité pour participer à sa prochaine création. Nous avons créé, avec lui et une danseuse, Emmi Väisänen, plusieurs micro-performances qui au final ont donné naissance à une pièce d’une heure, Screws. C’était la deuxième fois que notre collectif prenait part à une création, en tant qu’interprète. Alexander apportait régulièrement des « objets exotiques » au studio [N.d.lr : une boule de bowling, des crampons d’alpinisme, ...], avec lesquels nous essayions d’évoluer de manière créative. Sa double formation en danse et cirque et le travail physique qui résulte du croisement de ces deux disciplines était très stimulant pour nous qui en avons été témoins et l’avons éprouvé de l’intérieur.

Pour votre spectacle Surface, vous dansez, faites des acrobaties sur l’eau. Que vous apporte cet élément, en dehors du fait de pouvoir glisser dessus ?
FF : C’est un vrai défi de combiner eau et acrobatie. Si nous avions fait un test sur un plateau mouillé, avant de nous lancer dans la création de ce spectacle, nous aurions vraisemblablement tout stoppé ! C’est très dangereux, plus encore lorsqu’il s’agit de faire des acrobaties en duo ou à plusieurs, qui nous permettent d’atteindre des hauteurs élevées. Nous obligeant à nous adapter, l’eau nous a fait admettre et accepter nos limites. Comme nous ne pouvons plus pratiquer notre discipline comme avant, nous avons été contraints de trouver de nouvelles façons de nous déplacer. Au lieu de courir, nous glissons ; nous ne croissons pas à la verticale, mais à l’horizontale. L’eau, avec ses différentes qualités, fascinantes, est pour nous un matériau très inspirant avec lequel travailler. En fin de compte, il n’y aura pas d’autre issue possible à cette situation, que nous nous sommes infligée, que de nous soumettre au pouvoir de l’eau et à notre incapacité à la maîtriser.

ITV réalisée par Emmanuelle Floch en juin 2020