Cie AMA / Elodie Guézou x Magali Sizorn

RÉSIDENCE D’ÉCRITURE

RÉSIDENCE 25 > 29 avril 2022

“Je m’appelle Élodie, j’ai 34 ans. Au grand regret de ma mère, à l’époque conseillère au Pôle emploi, j’ai choisi de travailler dans le milieu du spectacle vivant, à l’âge de 19 ans. Après 3 ans de tournée en tant que chanteuse et musicienne pourle groupe KITOSLEV, j’ai suivi une formation d’actorat à Paris, au Center Method Acting. À 21 ans, en plus du théâtre et de l’audiovisuel, j’entame une expérience professionnelle de modèle photo. Par la suite, je deviens contorsionniste par facilité. Je commence ma (dé)formation professionnelle à l’âge de 23 ans au Centre régional des arts du cirque de Lomme-Lille, en spécialité équilibre et contorsion. Allant du théâtre documentaire avec Mohamed El Khatib (Moi, Corinne Dada ), au conte musical pour enfants (Émilie Jolie ), j’ai voulu expérimenter le théâtre et la danse en espace urbain, notamment en travaillant avec les compagnies N°8, Off et Antipodes. Et le comble, pour une contorsionniste, est qu’à cette époque je n’avais encore jamais travaillé pour une compagnie de cirque. Pour combler cette lacune, en 2015, je co-fonde le Collectif Non Identifié où naît Attentat Artistique – performances surprises en espace urbain. Puis en 2017 je crée la Compagnie AMA dans l’objectif de porter la pièce pour une interprète de cirque et onze metteur-se-s en scène – Cadavre Exquis. L’intention était de confronter l’espace de mon expression artistique en tant qu’interprète en invitant des metteur.e.s en scène à venir me diriger chacun sur 5 minutes. Donc en effet, tout comme un cadavre exquis, c’est surréaliste. Vous me direz, après tout je suis contorsionniste, ma spécialité est de me plier en 4. Le spectacle est sorti en mars 2020, dans le cadre du festival SPRING. Aujourd’hui l’écriture de la compagnie se définit à partir d’un postulat simple : l’esthétique circassienne n’est pas dépourvue de sens politique. J’envisage la création contemporaine comme une expérience, un geste sensible/social dont la dimension esthétique la plus exigeante doit se confronter au quotidien le plus banal. Depuis 2021, je me consacre entièrement aux projets de la Compagnie AMA que je coordonne artistiquement. Bientôt, de nouvelles créations, dont (Dé)formation professionnelle – solo documentaire autour de l’art de se plier en 4, verront le jour”.

Votre résidence d’écriture avec Magali Sizorn* porte sur un projet commun autour de l’interprète de cirque. Quels sont vos angles de recherche ?

Élodie Guézou : Notre projet interroge les spécificités des interprètes de cirque. Il est né de mon premier spectacle, Cadavre Exquis, créé au Vox avec La Brèche. Pour ce solo, j’avais invité 11 metteurs en scène à m’écrire chacun 5 minutes du spectacle. Durant toute la création, j’ai gardé les traces du processus (notes, indications de mise en scène, impressions, échanges audio, mails, whatsapp et vidéos, ainsi que les images du photographe présent pour l’occasion). Je souhaitais en tirer un carnet de création. Finalement j’ai développé une exposition compartimentée par metteurs en scène. J’ai ensuite contacté Magali Sizorn afin qu’elle pose là-dessus son regard de chercheuse en sociologie. L’écriture de ce carnet de création devenait ainsi l’objet d’une étude de cas. Nous avons soumis notre projet à la Direction Générale de la Création Artistique, dans le cadre d’un appel à projet de recherche en théâtre, cirque et marionnette. Et nous avons eu la chance d’être retenues. Notre résidence à La Brèche constituera notre première semaine de rédaction, suite à nos tables rondes et nos observations. Notamment notre observation au CNAC, seule école à pratiquer la reprise de répertoire. Il s’agissait cette fois-là du répertoire de Christophe Huysman. Emmener les étudiants à cet endroit-là nous intéresse tout particulièrement. Magali m’a également interviewée pendant plusieurs jours sur mon processus de création pour Cadavre Exquis. Je lui ai confié mon journal intime, où je notais mon ressenti en tant qu’interprète de cirque, et elle va bien sûr questionner mes 11 metteurs en scène. Notre cadre analytique s’appuie sur une dimension sociologique et anthropologique, mais aussi sur l’histoire du spectacle, les droits d’auteurs en cirque, etc. L’ouvrage, qui s’accompagnera d’une plateforme vidéo d’interviews d’interprètes de cirque, paraîtra en 2023.

*Magali Sizorn est enseignante-chercheuse (Maîtresse de conférences à l’Université de Rouen) et fait partie du Collectif de Chercheur·se·s sur le Cirque