Site Internet : https://www.clementdazin.fr/
Depuis son premier spectacle Bruit de couloir créé en 2013 jusqu’à aujourd’hui, Clément Dazin pose régulièrement ses valises à Cherbourg, où les portes de La Brèche lui sont grandes ouvertes. Un compagnonnage qui accueille aussi bien l’interprète, le metteur en scène, le créateur que le médiateur. Après ces dix années de soutien, la Plateforme 2 Pôles Cirque en Normandie consacre au jongleur un portrait d’artiste dans le cadre de SPRING 2023.
Votre prochain spectacle, Angst, est né de votre rencontre avec Lucas Bergandi. Une rencontre qui date d’une dizaine d’années.
Clément Dazin : Nous étions au Centre National des Arts du Cirque ensemble. Le déclic est apparu lors de notre travail pour le spectacle de fin de promotion This is the end. David Bobée, metteur en scène, nous demandait beaucoup d’improvisations. Je voyais Lucas sur son fil à deux mètres de haut et sans tapis. Il enchaînait les acrobaties, c’était dangeureux. Je lui ai suggéré de mettre un tapis en-dessous, qu’il ne réalisait peut-être pas les risques qu’il prenait. Il m’a répondu que s’il s’exerçait avec des protections, il aurait peur le jour où il faudrait les enlever. Cette discussion est restée gravée en moi tout ce temps. Je l’ai invité à participer à ma dernière création, mais il n’était pas disponible. Nous nous sommes retrouvés récemment pour une carte blanche au théâtre du Rond-Point.
Inops traitait de l’impuissance mais au fond de vous, vous vouliez sans doute déjà aborder le thème de la peur ?
CD : Certainement…Dans sa pratique, Lucas s’y frotte quotidiennement. Or c’est tabou dans le milieu du cirque, il ne faut pas trop en parler. La peur n’est pas abordée durant la formation des acrobates. Or c’est justement cet angle que je souhaite travailler. Au Théâtre du Rond-Point, les spectateurs s’arrêtaient de respirer en voyant Lucas. Selon moi, c’est l’un des meilleurs fildeféristes au monde. Et pourtant, les conditions de la carte blanche étaient particulières : Lucas sortait de l’avion et avait très peu de temps pour se chauffer et s’entraîner. Avant son numéro, il m’a avoué « avoir peur. » À la fin de la représentation, il m’a confié son envie de faire un solo dont je serai le metteur en scène. Un solo sur la peur. Ce fut une évidence ! Angst, peur en allemand, allait voir le jour.
Si la peur est taboue en cirque, comment allez-vous l’évoquer au plateau ?
CD : C’est là un vrai défi. Pour Angst, j’ai envie d’une adresse au public. Lucas va à chaque fois partager son ressenti avec les spectateurs. Mais le texte s’inspirera aussi de données scientifiques collectées sur la peur, sur sa chimie. Nous commencerons le travail en résidence par des improvisations dans des lieux non dédiés au spectacle : écoles, Éhpad… Dans Angst, Lucas débuterait sur son fil par une figure mythique, sacrée : le salto arrière. Sa réussite ou son échec déciderait à chaque fois de la suite du spectacle. Ici nous partirons de l’intime pour évoquer l’universel. Aujourd’hui, l’Homme se retrouve sans « prédateurs », et la peur s’est déplacée. Il n’en reste peut-être finalement qu’une seule, à part bien sûr celle de la mort : la peur de ne pas être aimé.
Production
La Main de l’Homme
Coproduction (en cours)
Plateforme 2 Pôles Cirque en Normandie / La Brèche à Cherbourg et le Cirque-Théâtre d’Elbeuf
La Main de l’Homme est conventionnée par La Ville de Strasbourg, la Région Grand Est et le Ministère de la Culture – DRAC Grand Est.