La Brèche

Rêve Parade, c’est un laboratoire artistique à ciel ouvert. Expliquez-nous comment, juste après le premier déconfinement, est née cette envie de chevaux au cœur de la cité, de cirque et de rencontres.
Arthur Sidoroff : Nous avons tous été empêchés de jouer et pourtant nous devions continuer à nous entrainer. Je me suis questionné: comment mettre en avant le cheminement de l’artiste et non l’objet fini qu’est un spectacle ? Comment s’impliquer plus localement et rendre nos pratiques plus poreuses avec la cité  et contrer le discours disant que l’artiste ne serait pas essentiel ? Je souhaitais bouger le curseur depuis l’essentialisme vers la nécessité d’avoir des artistes qui oeuvrent dans la ville. J’ai experimenté une première version sous le chapiteau du Kilowatt, en pleine friche industrielle à Vitry-sur-Seine, lors d’une résidence-atelier avec les jeunes des quartiers qui, une fois déconfinés, ne partaient pas pour autant en vacances. Le but était de transmettre non pas un savoir effectif, mais un désir.

Et parmi les artistes que vous aviez conviés à cet atelier, il y avait Laura Chassagne, voltigeuse à cheval.
AS : C’était un vieux rêve pour moi de ramener un cheval à Vitry, où j’ai grandi. Tous les matins, nous allions chercher un groupe de jeunes avec le cheval. Une fois sous chapiteau, nous improvisions puis leur ouvrions l’espace pour la pratique, avec les notes de guitare de Thomas Caillou : je travaille toujours en musique. L’objectif était que les jeunes aient envie de nous imiter. Ça a très bien fonctionné ! Et puis j’ai observé les réactions des habitants devant Vasco, le cheval de la voltigeuse, dans cette banlieue bétonnée. Les déterminismes sociaux étaient aussitôt suspendus et tout le monde se parlait ! D’autant plus que nous sortions tous du confinement… Je me suis dit que c’était comme ça que j’avais dorénavant envie d’exercer mon métier : avec des rencontres.

Des rencontres intéressantes socialement, mais aussi au sein du processus artistique…
AS : Comme quoi les artistes sont bien nécessaires ! Il faut fabriquer de la matière artistique, tel un sculpteur. C’est ce que nous faisons en rendant accessibles nos répétitions en acrobatie à cheval, fil de fer, musique, danse,… Juste avant le deuxième confinement, j’ai créé avec Julian Sicard, Thomas Caillou, dix autres artistes et un cheval, le spectacle MASSE pour la Nuit Blanche 2020 au Kilowatt. De toutes ces expériences post-Covid a découlé la création de la compagnie La Fauve et de Rêve Parade avec l’arrivé de mon cheval Johnny et de la voltigeuse Louna Latrouite (et son cheval Saylor). Le concept de Rêve Parade était né : un campement sur un territoire, une piste de cirque en extérieur, des artistes, des chevaux, un mur de son, beaucoup de rencontres et potentiellement un bal populaire à la fin !